Quelle Assemblée Constituante ?
Démocratie et Assemblée Constituante. Propositions et commentaires en sept questions.
1 - Démocratie : comment changer pour progresser ?
2 - Comment créer une Assemblée Constituante et comment désigner les citoyens Constituants?
3 - De combien de temps devrait disposer l'Assemblée Constituante avant de présenter un texte à soumettre à référendum ? Dans quelles conditions la réunir pour la première fois ?
4 - Combien de membres prévoir pour l'Assemblée Constituante ?
5 - Quelles seront les obligations des Constituants ?
6 - Combien coûtera l'Assemblée Constituante globale (territoriales et nationale) ?
7 – Pourquoi faudrait-il croire aux progrès de la démocratie ?
1 - Démocratie : comment changer pour progresser ?
La démocratie est le pouvoir donné au peuple, au sens littéral. C'est donc une organisation que se donne une collectivité, une société, une Nation, pour vivre ensemble. C'est un "Contrat social" accepté par la plus large majorité des citoyens à une époque et à un endroit donné. Elle est donc par essence en éternel devenir, au gré des générations, des découvertes de toutes sorts et de l'histoire des Nations. L'objectif de ces changements inéluctables est le progrès de la civilisation et de celui du bien-être collectif comme de chacun. Mais comment ces changements sont-ils réalisables?
Pour engager le débat sur la démocratie et donc sur les moyens de permettre son évolution, au moins trois hypothèses et un projet semblent nécessaires (dont les contenus sont ici ouverts aux débats).
Les trois hypothèses proposées sont les suivantes :
1 Nous supposons qu'une organisation démocratique (au moins dans ses intentions) préexiste et que nous prenions pour point de départ l'organisation actuelle de la démocratie en France. Les droits fondamentaux sont alors acceptés pour tels qu'ils sont définis par les textes externes à la Constitution actuelle de 1958 (textes cités par le préambule) et que ces droits peuvent être éventuellement éttendus mais non réduits.
2 Nous supposons qu'un processus de progrès vers une nouvelle Constitution ou qu'une modification significative de la Constitution actuelle est possible. La forme sociale du pays envisagée, dans cette hypothèse, par la nouvelle Constitution, reste alors celle d'une République telle que l'Article 1 de la Constitution de 1958 la définie :
"La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. Son organisation est décentralisée.
La loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu'aux responsabilités professionnelles et sociales." Si des changements à ce texte sont envisageables, comme pour les droits fondamentaux, ils ne peuvent alors être plus restrictifs.
3 Nous devons supposer enfin que la procédure de révision constitutionnelle majeure est décidée par les citoyens à leur initiative pour mettre en place des institutions qui conduiront à un progrès de la démocratie. ''Il faudra donc que soient au préalable définies des règles de désignation des citoyens qui seront chargés par le peuple français de préparer cette nouvelle Constitution. Le progrès sera alors apprécié, évalué, sur la capacité des représentants du peuple à offrir à chacun de nouvelles institutions mieux protégées des dérives de la démocratie que sont : la corruption, l'accaparement du pouvoir et des médias de communication par une caste ou par des oligarques inamovibles, les privilèges ou l'impunité accordés aux représentants ou à ceux qui financent leurs campagnes, la confusion ou le défaut de séparation des pouvoirs, la déficience des capacités données aux citoyens poiur s'exprimer et proposer des changements, le manque de contrôle des institutions ou des représentants par le peuple et l'absence de mesures correctives après la détection de ces dérives.
Le projet.
La démocratie exige donc que ces institutions et leur fonctionnement soient définies par le peuple et non par ses représentants. C'est bien la fonction d'une Assemblée Constituante que le peuple doit désigner, mais d'une façon qui soit elle-même "démocratique".
Pour ne pas entrer dans un cercle vicieux, la solution consiste à proposer au préalable différentes méthodes de désignation des premiers "pré-constituants" et des projets ouverts à leur soumettre en utilisant par exemple les réseaux collaboratifs dédiés, projets que chacun pourra commenter et dont des ateliers feront la synthèse.
Pour Concrétiser cette approche il convient en premier lieu de proposer les conditions de mise en place de cette Assemblée Constituante préparatoire, puis sa transition vers un Assemblée Constituante de plein droit.
Voici une proposition, à commenter puis à proposer aux citoyens qui voudront bien s'exprimer, pendant un temps défini, dont l'échéance serait par exemple une échéance électorale. Comme cas concret, nous pouvons prendre la fin de l'année 2017 alors que de nouveaux représentants seront en place.
2 - Comment créer une Assemblée Constituante et comment désigner les citoyens Constituants?
Voir le projet de pétition et le projet de texte référendaire adressé à la Présidence de la République sur la page d'accueil de ce site.
Tout membre d'une Assemblée Constituante, qu'elle soit territoriale ou nationale, devra s'engager juridiquement dès sa candidature à ne plus jamais briguer de mandat électif et à respecter le Code de conduite des élus (du type de celui que signent les députés européens).
La durée du mandat doit être courte (disons au maximum deux ans ou un an renouvelable une seule fois.
Note ; la durée de un an proposée par certains peut sembler un peu courte pour à chaque membre de prendre la mesure de ses fonctions et pour donner le meilleur de soi-même, comme pour organiser les transitions entre membres et leur permettre de juger du bien-fondé des actions et un mandat de plus d'un an ne doit pas être renouvelable.
On peut imaginer de remplacer les membres par moitié tous les ans par exemple, les premiers à être remplacés étant les volontaires démissionnaires et, si nécessaire, le complément pourrait être issu des listes de jurés dont les communes disposent.
Note : procéder à un renouvellement intégral pourrait sembler plus logique et plus pratique au plan organisationnel, mais fait courir le risque d'un manque de continuité dans les affaires en cours et d'une perte brutale de compétences.
Incompatibilités :
Il serait intolérable pour les fractions du peuple en charge d'élaborer une Constitution ou de la faire évoluer de délibérer avec (ou sous) la pression des figures les plus emblématiques ou parties prenantes des présentes institutions. Parmi les « interdits » pourraient figurer les élus (peut-être à l'exception des conseillers municipaux petites communes – moins de 9 000 habitants, seuil pour le financement des campagnes électorales-), les hauts fonctionnaires de l’État (magistrats,...), les membres du directoire des grandes entreprises et des organismes de financement, publics ou privés fournisseurs de l’État et/ou subventionnés par lui…
Note : Cette discrimination pourrait sembler contraire à l'Article 2 de la Déclaration Universelle des Droits de l’homme qui précise que « Chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés proclamés dans la présente Déclaration, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d'opinion politique ou de toute autre opinion, d'origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation ». Cependant cette liberté ne doit pas venir en contradiction avec le respect des droits d'autrui que l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen affirme : "La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l’exercice des droits naturels de chaque homme n’a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la société la jouissance de ces mêmes droits".
C'est l'une des raisons pour lesquelles une Constitution doit prévoir l'impossibilité de cumul de mandats et de renouvellement d'un mandat donné, mais aussi un séparation stricte des pouvoirs, dispositions qui permettent que nul ne puisse jamais être à la fois juge et partie dans l'élaboration de règles qui s'appliqueraient à ceux qui en sont à l'origine, ou qui leur permettrait de s'accorder des privilèges. Cette règle de séparation nécessaire entre juge et partie appartient aussi aux règles juridiques qui « ne s'appliquent qu'à défaut de dispositions écrites contraires … suivant la matière qu'elles concernent, elles s'inclineront devant la loi ou le règlement. Telles sont par exemple les règles générales de procédure applicables même sans texte devant toutes les juridictions administratives, parmi lesquelles on peut citer … l'interdiction d'être juge et partie (Conseil d’État, 2 mars 1973, Demoiselle Arbousset)
Un certain nombre d’événements portant sur le non respect de cette règle de séparation ont d'ailleurs mis en cause le Conseil d’État lui-même et ont attiré l’attention sur son statut de juridiction. Les possibilités de collusions entre le Conseil d’État et le pouvoir politique sont apparues manifestes à plusieurs reprises : affaire Canal en 1962 qui a failli entraîner sa chute, ou encore les affaires « Procola » en 1995 et l'affaire Kress contre France en 2001 (Cour européenne des droits de l’homme CEDH) dont l'arrêt est reproduit ici. En vertu de la théorie des apparences, la règle de la double appartenance des magistrats du Conseil d’État fait craindre le risque qu'il soient juges et parties. Il n'y a pas d’impartialité structurelle quand un tribunal peut dans la même composition rendre un avis et un jugement sur la même question. Le Conseil d’État est ainsi considéré comme violant l'article 6 de la Convention des droits de l'homme :
Affaire Kress. Arrêt de la CEDH « … De l’avis de la Cour, l’avantage pour la formation de jugement de cette assistance purement technique (du commissaire du gouvernement) est à mettre en balance avec l’intérêt supérieur du justiciable, qui doit avoir la garantie que le commissaire du gouvernement ne puisse pas, par sa présence, exercer une certaine influence sur l’issue du délibéré. Tel n’est pas le cas dans le système français actuel ! .. En conclusion, il y a eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention, du fait de la participation du commissaire du gouvernement au délibéré de la formation de jugement. »
Les citoyens librement réunis au sein de l'Assemblée Constituante Citoyenne et dont ils sont membres actifs, avec droit de vote (et non membres conseillers sans droit de vote, élus ou nommés venant d'autres institutions publiques), engagés solennellement à ne jamais assumer personnellement les pouvoirs définis par eux-mêmes, conscients de l'importance des institutions pour garantir la protection des citoyens contre les abus de pouvoir et pour assurer le progrès commun, décident par la voix de cette Assemblée de proposer une nouvelle Constitution (et, par la suite, ses modifications) en vue d'établir et de maintenir les fondements d’une authentique démocratie, adaptée au monde contemporain par ce contrat social, concrétisation du droit des peuples, souverains, à disposer d'eux-mêmes.
3 - De combien de temps devrait disposer l'Assemblée Constituante avant de présenter un texte à soumettre à référendum ? Dans quelles conditions la réunir pour la première fois ?
Au minimum deux à trois années seront sans doute nécessaires pour rassembler les demandes des citoyens, regroupées par territoire puis synthétisés. Il semble que le présentation pour avis au Conseil Constitutionnel, lors du premier rassemblement de la Constituante, serait nécessaire pour garantir la légalité du texte et de la procédure. Il conviendrait donc de s'assurer du soutien d'un nombre significatif d'élus, à titre de conseillers (mais non décideurs) pour que le processus soit possible (voir article 11 de la Constitution de 1958).
S'affranchir de ces étapes reste envisageable, mais il faut être conscient que l'on s'engage alors nécessairement dans une confrontation dont l'issue sera incertaine.
Il serait également indispensable de faire agréer (par le Parlement?) les modalités d'élection d'un Constituante si on souhaite rester dans la légalité et rassembler une Constituante « formelle » dès sa première mise en place. Ce point semble difficile à garantir dans des délais raisonnables. Le choix préférentiel (c'est celui que le Projet Constituant propose) semble donc être de construire, pour sa première mise en œuvre et sur des principes du type qui seraient proposés par la suite, une Assemblée Constituante « informelle ». Les moyens actuels de communication en réseau doivent le permettre, au travers d'un collectif d'associations ayant travaillé sur ces questions et avec l'aide d'experts.
Par la suite, l'Assemblée Constituante désignera tout aussi bien une Assemblée formelle ou informelle.
4 - Combien de membres prévoir pour l'Assemblée Constituante ?
Il y a en France environ 44,6 millions de citoyens inscrits sur les listes électorales.
Avec 450 constituants pour l'Assemblée Constituante nationale en propre, cela représenterait près d'un constituant national pour 100 000 électeurs. Mais les populations des départements vont d'environ 80 000 à près de 2 600 000 habitants ! Chaque département devrait donc obligatoirement compter dans ce cas au moins 1 et au plus 26 constituants nationaux.
Note : du fait de leur démographie, certains département auront plus de représentants que d’autres, ce qui est équitable en terme de représentativité.
En 2014, la France compte 2 134 établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) : 1 892 communautés de communes, 222 communautés d’agglomération, 15 communautés urbaines, 4 Syndicats d'agglomération nouvelle et 1 métropole.
Si chaque EPCI compte moyenne 100 constituants territoriaux (à ajuster au prorata de la population représentée), il faudra élire environ 200 000 constituants territoriaux (soit environ 1 pour 223 électeurs), qui éliront parmi eux les 450 constituants nationaux.
Afin de palier aux défections, il serait nécessaire de compléter cette liste d'élus par une liste complémentaire de 50 000 suppléants.
Pour être efficaces, les Assemblées Constituantes territoriales devraient comprendre au moins 45 membres, et au maximum 450 membres. Les choix seront décidés localement, en fonction des densités de population et des moyens de communications locaux.
Les populations des EPCI vont d'un peu plus de 5 000 à un peu plus de un million d'habitants. Certains EPCI devront donc se regrouper pour disposer si possible d'au moins 10 000 électeurs, et d'autres auraient à se scinder en circonscriptions d'EPCI pour ne pas dépasser environ 100 000 électeurs. Ces regroupements et ces partitions seront à décider uniquement par les EPCI concernés, en consultant leurs citoyens. Ceci est un exemple, qui fait un compromis entre le coût de l'opération et la représentativité.
5 - Quelles seront les obligations des Constituants ?
Chaque assemblée devrait se réunir un à deux jours par semaine et chaque constituant devrait participer au minimum à une réunion par semaine. Les Assemblées, sur ces principes, établissent leur règles de fonctionnement sur le principe des associations et déposent ces règles auprès du tribunal d'instance dont leur siège dépend, qui règle les litiges.
Les Constituants territoriaux auront à débattre et à rédiger les principes, les thèmes et les articles proposés pour la future Constitution. Une fois par mois, il devront, si besoin après avoir consulté des experts à leur convenance, faire parvenir leurs travaux à l'Assemblée Constituante nationale. Cette dernière travaillera uniquement à établir les synthèses des propositions territoriales en respectant les propositions majoritaires dans un esprit d'équité. Elle pourra consulter les experts choisis par elle à sa convenance.
Tout Constituant qui ne participerait pas à au moins deux réunions au cours d'un mois serait considéré comme démissionnaire et immédiatement remplacé par le suppléant disponible ayant reçu le plus grand nombre de voix.
6 - Combien coûtera l'Assemblée Constituante globale (territoriales et nationale) ?
Les constituants des Assemblées formelles percevront des indemnités compensant les frais de fonctionnement liés à leur fonction, selon leur participation effective, sur la base des seules indemnités journalières calculées, au maximum, dans les mêmes conditions que celles prévues pour les députés européens ; ces indemnités viendront en complément de leur rémunération dont le montant, comme pour tous les représentants du peuple, quel que soit la nature de leur mandat, sera calculé sur la base de leur déclaration de revenus de l’année précédant leur mandat afin qu’aucun ne puisse être motivé par le profit lié à son statut mais par sa volonté d’améliorer le quotidien des citoyens. Ils seront remboursés des frais de transport, de repas et d'hébergement engagés sur les mêmes bases que la celles appliquées à la fonction publique..Tout Constituant peut exercer une activité professionnelle compatible avec son mandat. Tout Constituant salarié doit se voir accorder une journée hebdomadaire par son employeur, non rémunérée mais pour laquelle les cotisations de retraites seront versées.
La réduction du nombre de parlementaires et sans doute de certaines institutions que la Constitution doit prévoir compensera les frais engagés pour cette Assemblée Constituante nationale, qui a vocation à rester active et permanente.
Note : il suffit qu’elle le soit grâce à une cellule de veille, les réunions plénières de l'Assemblée n'ayant lieu que pour le débat et le vote ou la préparation à référendum des lois organiques et des textes constitutionnels.
En effet, aucune Constitution ne peut s'imposer aux générations futures et doit donc être organisé pour rester révisable tout en préservant les citoyens de l'instabilité, de plus elle aura à organiser les référendums pour ces révisions et pour le vote des lois organiques.
7 – Pourquoi faudrait-il croire aux progrès de la démocratie ?
Denis Giraux, dans la revue « Siècles » 37 | 2013 : La démocratie directe à l'épreuve du temps nous explique que « nous vivons dans un monde de plus en plus global, village planétaire composé de villes surpeuplées en progression, et c’est un univers massifié de plus en plus incertain dans sa capacité à faire face aux fantastiques défis d’une population de plus de sept milliards de membres qui veulent boire, manger et s’épanouir. Pas plus que n’existera jamais une mondialisation heureuse, vendue par certains démagogues, ne se profile une démocratisation généralisée chantée par d’autres. Mais sauf à considérer que l’homme est incapable de s’empêcher de détruire son environnement et son prochain, il faut se départir de cette vision mortifère et tout mettre en œuvre pour le faire évoluer vers l’idéal démocratique, seule modalité politique raisonnable de nature à assurer, à notre humble avis, un avenir tout court à l’Humanité. »
Tout mettre en œuvre ! Mais par qui, et comment ? Les politiques s'en sont montrés incapables, ce sont donc les citoyens eux-mêmes, libres de toute idéologie et de toute attache partisane anesthésiante, qui devront contribuer à cette mise en œuvre, en commençant par le commencement : l'établissement d'un contrat social garant de leurs libertés et de leurs droits.
Les responsables politiques au pouvoir et leurs suppôts ont pour leur part toujours tenté de faire croire que le destin des hommes était configuré par « le politique », que le pouvoir politique construisait le devenir historique en fonction de ses projets. Il n’en est rien. En réalité, ces soi-disant « projets » ne sont très généralement que les manifestations, traduites en discours manipulateurs et pétris de bonnes intentions, d'ambitions personnelles à court terme ou de soif de pouvoir. Le devenir historique et les progrès de l'humanité résultent plutôt d’une multitude d’initiatives individuelles ou de petits groupes, certaines d’entre elles pouvant avoir un impact majeur car elles constituent des innovations de portée historique. Ainsi, par exemple, la révolution technologique qui débute à la fin du 20e siècle avec les technologies de l’information et de la communication, les biotechnologies, les sciences cognitives et leur synthèse, et bien d'autre découvertes scientifiques, se diffuse dans la société par l’action de savants, d'esprits innovateurs ou d’entrepreneurs qui ont le sens du progrès et qui comprennent bien avant le monde politique les bouleversements que peuvent induire certaines innovations et certaines avancées de l'esprit. Les « politiques » deviennent ainsi, par conservatisme, peur du changement risquant de mettre en péril leurs privilèges, à moins que ce ne soit pour la recherche de nouveaux privilèges par leurs concurrents et par l'usage de la violence, un frein aux progrès.
La révolution française de 1789 a-t-elle joué un rôle essentiel sur le cours de l'histoire à long terme de la France et sur la vie de nos contemporains ? Les absurdes guerres de conquête napoléoniennes ont-elles eu la moindre importance durable ? Les réponses sont évidemment négatives car de nombreux autres pays en Europe ou ailleurs ont connu des péripéties politiques radicalement différentes pour aboutir aujourd’hui à un mode de vie et à un niveau de vie similaires aux nôtres. Le siècle des lumières et ses philosophes ont préparé culturellement une évolution profonde de la société puis sa mise en œuvre fut le fait d’innombrables initiatives individuelles qui se manifestent aujourd'hui dans le système de production, les nouveaux modes d'échange et de communication et les progrès de la recherche scientifique. En France, après les monarchies asservissantes, les « nouveaux » politiques n’ont fait que caricaturer une pensée orientée vers la liberté pour aboutir finalement à la dictature de Robespierre puis à celles de Napoléon Ier et de ses immédiats successeurs. Sciences, techniques et économie déterminent l’avenir, avenir que la politique ignore et ne modèle pas. Les politiques ne font alors au mieux que suivre le mouvement, quand ils ne l'entravent pas.
Attila, Gengis-khan, Tamerlan...Leurs noms sont dans toutes les mémoires. René Grousset nous rappelle les récits des chroniqueurs occidentaux, des annalistes chinois ou persans qui ont popularisé leurs figures. Il nous montre qu'ils surgissent, ces grands barbares, en pleine histoire civilisée et brusquement, en quelques années, font du monde romain, du monde persan ou du monde chinois un monceau de ruines. De même, les Croisades déclenchées sous un faux prétexte par l'empereur de Bysance pour sauver son empire et les autres guerres dites de religion liées à affaiblissement de l'autorité politique en France ont dévasté l'Europe et le Proche-Orient.
Après eux, Napoléon, ou des individus comme Lénine, Staline, Hitler, Mussolini et les psychopathes assoiffés de pouvoir ont évidemment eu moins d’importance pour le progrès humain que Louis Pasteur, Alexander Flemming et même que mère Teresa ou que l’abbé Pierre. Les premiers auront exercé un temps leur capacité de nuisance en conduisant à la mort des millions de femmes et d’hommes, mais il ne restera rien de leurs apports constructifs à l'humanité dans quelques siècles. Les seconds ont permis à des centaines de millions d’êtres humains de se soigner et de guérir ou sont venus donner un exemple d’élévation morale tout à fait hors du commun. Ils resteront dans la mémoire collective avec leurs actions dont les bienfaits se prolongent encore.
De nouveau, les systèmes politiques contemporains, par leur passivité, ou par leur collusion avec les puissances financières, sont dans l'incapacité de contrarier leurs capacités de nuisance, et ces organisations maintenant à structure planétaire que les politiques ont laissé se développer, voire qu'ils ont favorisé, sont en pratique inaccessibles à toute sanction malgré leurs évidentes exactions. S'en suivent des crises de plus en plus graves ou pire, le développement de divers terrorismes à prétexte religieux mais en réalité à caractère mafieux que ces organisations, ou même certains États, financent ! Ce sont les individus, et les équipes qu'ils constituent autour de projets, qui dessinent peu à peu l’avenir par leur capacité de réflexion, d’expérimentation et d’innovation. Le futur constitue toujours une surprise et ne se décrète pas « politiquement ». Il est absurde de prétendre construire la société de demain à partir d’une réflexion sur le présent conduisant à des soi-disant prescriptions éthiques et politiques, préétablies et intangibles, poudre jetée aux yeux des peuples par les politiques, prescriptions qui ne sont d'ailleurs pratiquement jamais respectées ou qui sont dévoyées.
Mais les hommes sont incorrigibles, nous dit Patrick Aulnas : ils feront toujours prévaloir leur liberté. L’intelligence, ses productions et leurs spécificités, ne se conçoivent que dans la liberté. Le charme de la vie, tout comme les progrès de l'esprit humain, c’est l’ouverture vers l’avenir conçu comme une aventure de la liberté individuelle dans le respect d'autrui. Cette dernière règle du vivre ensemble n'a pas à être imposée aux hommes par de quelconques mouvements politiques ni par leurs représentants au pouvoir, ou qui en rêvent. Cette réflexion est inspirée par les travaux de très nombreux auteurs, comme Cynthia Fleury ou Éric Le Boucher qui n'hésite pas à affirmer « Depuis trente ans, les politiques, de gauche et de droite, dévorent les forces de la France. Par peur de la rue, inoculant année après année la drogue des dépenses publiques et du déficit ».
Face à cette incapacité des « politiques » à penser le futur, ce sont bien les femmes et les hommes eux-mêmes, en toute liberté et sans idéologie politicienne, qui doivent se mobiliser pour élaborer ensemble leur contrat social et s'accorder sur son application : un contrat adapté et adaptable à leur environnement culturel, économique et social du moment, et ouvert aux innovations, une Constitution des citoyens libres, que les générations successives doivent pouvoir faire vivre librement. Les moyens nouveaux de communication, les espaces collaboratifs et la mobilisation populaire face aux faiblesses des politiques ouvrent la voie à cette possibilité. L'objectif est donc de préparer, grâce à une Assemblée constituante citoyenne ouverte sur le peuple, une Constitution des citoyens pour le XXIe siècle respectueuse de la Déclaration universelle des droits de l'homme et en particulier de son Article 21 :
1. Toute personne a le droit de prendre part à la direction des affaires publiques de son pays, soit directement, soit par l'intermédiaire de représentants librement choisis.
2. Toute personne a droit à accéder, dans des conditions d'égalité, aux fonctions publiques de son pays.
3. La volonté du peuple est le fondement de l'autorité des pouvoirs publics; cette volonté doit s'exprimer par des élections honnêtes qui doivent avoir lieu périodiquement, au suffrage universel égal et au vote secret ou suivant une procédure équivalente assurant la liberté du vote.
Cette liberté pour toute personne de prendre part à la direction des affaires publiques et d'accéder, dans des conditions d'égalité, aux fonctions publiques, la Constitution française de 1958 ne l'accorde pas, et sa réécriture s'impose, sans délai.